
Nous avons tous été témoins des nombreuses campagnes de communication lancées par la banque UBA ces derniers mois. Il est impossible de vivre au Cameroun, du moins dans les grandes villes, et de les avoir manquées. Que ce soit directement sur nos appareils mobiles, via internet ou encore en marchant dans les rues, les couleurs rouges et blancs nous ont envahis, accompagnées de messages aussi nombreux que distincts. Nous nous intéresserons à l’une d’elles en particulier car elle a marqué notre attention au point de nous interroger sur sa pertinence et son efficacité. Nous tenterons d’apporter des réponses à ces questions tout en proposant, selon nous, ce qui aurait pu mieux fonctionner. Commençons par une légère diachronie, un retour dans le temps.
Le positionnement
Depuis 2014, UBA s’est positionnée comme une banque pour les jeunes et avec lesquelles elle comptait grandir. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle a eu la magnifique idée d’implanter des agences dans les universités publiques (à Douala, à la cité SIC campus 1 et à Yaoundé, à Ngoa Ekélé) via un partenariat bien ficelé. Ce dernier permettait à tous les universitaires d’avoir une carte d’étudiant qui faisait à la fois office de carte prépayée visa.

A l’époque, l’idée était très bonne (elle le serait tout aussi aujourd’hui d’ailleurs). Faire découvrir la banque de façon légère et progressive à tous les jeunes qui passent le cap des études secondaires ; ce qui créera en eux le réflexe de se tourner vers UBA plus tard, au moment de faire le choix d’une banque et de se créer un compte personnel ou même d’entreprise. Ainsi, UBA a aidé à la démocratisation de l’univers bancaire mais aussi et surtout du e-commerce et des mentalités d’achats sur internet. Un positionnement fort intelligent de la banque qui lui assurait l’intérêt et peut être même la fidélité des futurs employés, cadres, patrons et débrouillards de ce pays.
La campagne
Débutée en juin 2020, cette campagne de communication a énormément fait parler d’elle. L’objectif étant certainement l’affirmation de son positionnement en tant que banque digitale par excellence, à la suite de la campagne autour de l’avatar LEO, l’assistant virtuel qui vous facilite la compréhension et l’utilisation des divers outils digitaux bancaires mis à disposition (une réussite d’ailleurs). Cet objectif d’affirmation de positionnement est clairement inscrit dans le nom même de la campagne : « La banque digitale leader ». Un message impossible à manquer tant que la banque a su se faire voir et entendre. Une kyrielle d’affiches publicitaires de partout et une présence digitale puissante au travers d’affichage publicitaire de toute sorte avec, en avant, le message « J’ai rejoint la banque digitale leader et toi ? ».
Se faire voir et entendre est bien mais se faire comprendre, toucher et rester dans le cœur de sa cible c’est MIEUX.
En effet, au-delà de cette visibilité accrue, c’est bien le choix de la stratégie et des moyens de sa mise en œuvre que nous questionnons dans ce billet. Pour rappel, UBA a choisi des brand ambassadors accompagnés du message cité plus haut pour « toucher » ses cibles et s’est reposée sur sa force médiatique pour se faire entendre. Cet alignement stratégique soulève de nombreuses interrogations sur le choix de ces ambassadeurs, la pertinence et l’efficacité du message en lui-même et le timing utilisé pour diffuser ce dernier.
Nos remarques
1. Les brand ambassadors
Lydol, Markus, Annie Anzouer, L’inconnue, et beaucoup d’autres (inconnus du grand public pour la plupart) ont été choisis pour représenter cette affirmation de positionnement. Autant on comprend le choix de certains, autant on est perdu sur celui d’autres. Ils sont d’univers différents, sont populaires et inconnus mais pourtant, doivent parler à la cible de la banque 🤯. On a plus eu l’impression que UBA a récupéré les « ambassadeurs » de la campagne de la fête de la musique pour réduire les coûts, puis a rajouté quelques jeunes dynamiques et des « no name » histoire d’obtenir un semblant d’ensemble consistant.

2. Le message : « La banque digitale leader ».
On revient de peu sur les ambassadeurs. N’aurait-il pas été plus judicieux de donner plus de sens à l’expression « digital Leader » en choisissant des ambassadeurs qui soient leaders dans ce domaine et qui ont en même temps une certaine popularité auprès de la cible ? Si nous analysons les choix faits à ce niveau, on a :
- Lydol : bonne présence digitale et leader dans son domaine d’expression, le slam.
- Markus : présence digitale moyenne et position de leader mitigée dans son domaine d’expression
- Annie Anzouer : présence digitale moyenne et position de leader mitigée dans son domaine d’expression
- L’inconnue : présence digitale moyenne et position de leader mitigée dans son domaine d’expression
- Le reste : pour la plupart, des inconnus du grand public.
De plus, ce slogan parle de UBA sans parler de la ou à la cible. Il renvoie plutôt un sentiment de narcissisme et d’exclusion que d’inclusion. Comment se sentir concerner et marquer ? Sauf si l’on souhaite faire une campagne ponctuelle sans impact sur le long terme.
3. L’enchainement des campagnes (le timing)
En ce moment même, sont actives 4 campagnes :
- La banque digitale leader
Le sujet de notre article

- Young and Bold
Emission TV présentée par Valery Ayena et qui parle de jeunes cadres ambitieux qui se sont démarqués dans le monde de l’emploi.

- Nextgen
Un compte d’épargne générateur d’intérêt qui facilite l’inclusion massive des étudiants dans le système financier

- Leo (toujours encours)
Nous l’avons décrit plus haut.

- Autres
Sans oublier les nombreuses autres idées stratégiques implémentées telles que GoDigital (jeu concours), Digital Class (tutoriel), Talk with UBA (talk live) et bien d’autres.
Autant d’informations sur une aussi courte période, donnent beaucoup plus une impression de cacophonie que de clarté. Le message de la campagne n’a pas encore été compris et digéré que d’autres surviennent, en plus de la communication standard sur les produits de la banque.
Proposition de solution
Le storybrand
« La narration est la meilleure arme qui soit pour lutter contre le tapage, car elle structure si bien les informations que nous sommes obligés de l’écouter mais surtout de retenir l’histoire qu’elle raconte. »
Donal Miller – Storybrand
Et si UBA avait reposé sa stratégie sur une histoire ? Restituons le besoin. Il est question pour une banque qui a entamé une relation depuis près de 10 ans avec des étudiants (futurs adultes et clients), et qui souhaite aujourd’hui s’affirmer comme leader sur le digital, de renouer avec ceux-ci de façon durable.
Il s’agirait donc de puiser dans son passé avec les jeunes universitaires, pour raconter une belle histoire ; le début de leur relation commune, les hauts et les bas, jusqu’au jour où avec eux, elle devient « La banque Digital Leader ». Une bonne histoire, avec l’avantage certain d’être aussi intemporelle. C’est le cas de l’une des publicités les plus marquantes et connues à ce jour au Cameroun : « Il a fallu du temps » de UCB pour la bière Kadji.
Des dizaines d’années après, on s’en souvient toujours. Tout simplement parce qu’elle racontait une belle histoire, celle d’un homme (d’une légende) qui a durement et longtemps travaillé, pour obtenir un produit de « grande classe ».
Comme le dit (encore) Donald Miller :
« Une bonne histoire, c’est de la dynamite. Un bon scénario vous insuffle en permanence une énergie capable de déplacer des montagnes et captivera votre auditoire des heures durant, voire des années… Quand vous suivez une histoire, celle-ci rêve pour vous ».
Notre approche
UBA aurait pu par exemple choisir 5 anciens jeunes universitaires types, populaires et leaders aujourd’hui dans leurs domaines respectifs, pour raconter de belles histoires. Des jeunes qui ont connu la banque dès leurs arrivées à l’université et grandi avec elle. Quelques exemples de jeunes qui auraient bien pu faire l’affaire :
- Atome (université de Douala)
- Steve Fah (université de Yaoundé 1)
- Madiba Olivier (université de Yaoundé 1)
- Nanjip Cabrel (université de Douala)
- Ntamack Thierry (université de Yaoundé 1)
- …
Cette stratégie est moins coûteuse, claire et très efficace, car elle rétablira le lien perdu avec cette cible tout en créant un autre avec la nouvelle génération. La banque mettrait du même coup cet auditoire au cœur de son discours et de sa stratégie en lui donnant un sentiment d’appartenance tout en se positionnant comme le guide qu’elle doit être. Un guide qui accompagne ladite cible vers sa réussite.
Pour finir…
Reconnaissons tout de même qu’un réel changement s’est opéré dans la direction digitale des « rouge et blanc » avec une présence web très forte et des stratégies qui se suivent chaque jour. Cette campagne a le mérite de s’être faite entendre mais pas forcément comprendre. Et vu que le but de toute entreprise est de survivre sur la durée, il aurait mieux valu qu’elle touche les mémoires et les cœurs. En ceci, nous pensons qu’elle s’est « loupée » et pouvait faire preuve de plus de créativité. Peut-être est-il encore temps de se rattraper ?
Et toi, comment décrirais-tu cette campagne ? Quelle impression t’a-t-elle laissé ? Réponds-nous en commentaires plus bas ou sur nos différents réseaux sociaux.
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PS : ceci reste une modeste contribution aux efforts déjà ardus des initiateurs et gestionnaires de cette campagne. Des constats et propositions qui sont faits dans un potentiel objectif d’amélioration sans prétention aucune.